l’hystéro du banc de touche
Déjà qu’il a fallu me faire violence pour mettre sur la touche mes transferts d’espoirs artistiques pour n°1 : la seule vue d’un crayon lui procure de tétaniques convulsions, voilà qu’en plus, je m’y retrouve collée… Sur le banc !
Et pour cause, du haut de ses 6 ans à peine soufflés, mon bébé tout juste sorti de ses couches a pris l’irrémédiable décision de faire du foot. Et ni les vacances à lui faire essayer 275 disciplines, ni les 37 spectacles bringuebalants, fanfares casserolantes et concerts cinglants que je m’acharnais à imposer à ses menues écoutilles n’ont eu raison de sa vocation soudaine.
Septembre sonnant, j’achète la panoplie Cavani (gel douche compris), passe le protocole sanitaire de rigueur et signe fébrilement pour le contrat annuel m’engageant à encourager sans ménagements les tentatives de dribbles, petits ponts ratés et frappes mal cadrées de ladite progéniture. M’inscrire au club de dictée des seniors ne m’aurait pas moins excitée.
Me voilà donc grelottante un samedi matin de novembre, sacro saintement dédié aux grasses matinées, en train d’applaudir en silence – essayez, vous, de faire du bruit les mains pelotonnées dans une paire de gants polaire – les prouesses footballistiques du mini-mâle.
C’est à ce moment qu’une furie se met à vociférer sur le bord du terrain. Une fois, ok, ça peut arriver. Mais ça ne s’arrête pas là. Et je dois dire que foot + froid + décibels + injures ont tendance à produire chez moi l’effet d’une pina colada surdosée en rhum et dont le lait de coco aurait tourné à l’eau savonneuse…
Rageuse, mais courtoise, je me fends d’un “chère madame, je vous saurais gré de bien vouloir diminuer de façon significative le niveau volumétrique de vos interventions, au risque de faire rejaillir des tréfonds de mon être de primitifs instincts assassins qui pourraient, bien malgré moi, me mener à exercer à votre encontre une astreinte physique peu à propos.”
La laissant coite, je prends ma chasuble à mon cou et repars encourager ma descendance qui, loin de m’adresser de charmants petits cœurs cerclés de ses doigts graciles, me lance des regards qui me laissent à penser qu’il a moyennement apprécié mon intervention du moment.
Le calme revenu, je consens à enlever mes gants pour faire acte de présence positive. Mais voilà que ça recommence. “Allez loulou, agressif ! On lâche rien ! allez allez, on y va, au contact!”, la voix s’éraille à force d’énervement, mais elle ne perd rien de sa vigueur.
“Encore, on colle ! Allez, tu vas lui faire manger son bouillon d’herbe à celui-là, pour une fois, il aura eu sa dose de légumes journalières !”. Cette fois les yeux sont rivés sur moi… C’est moi qui parle là ??