vins du beaujolais- le grain de sénevé –

9 Oct 2019

il était une foi…

HERVÉ RAVERA N’EST PAS DU CRU. EN TOUS CAS PAS DE CELUI-LÀ. ET C’EST VRAI QU’IL N’EST PAS NON PLUS L’HÉRITIER D’UNE LONGUE LIGNÉE DE VIGNERONS. DANS UNE RÉGION OÙ LE VIN COULE DANS LES VEINES DE GÉNÉRATION EN GÉNÉRATION, SON PROFIL DE CONVERTI FAIT DONC DE LUI LA PREUVE VIVANTE QU’AVEC PASSION ET DÉTERMINATION, ON PEUT FAIRE DU VIN, ET DU BON.

Il ne vient pas de si loin que ça : c’est à une centaine de kilomètres plus au nord, en Côte d’Or, qu’Hervé Ravera a grandi, au sein d’une famille de restaurateurs dont l’établissement était le rendez-vous des chasseurs… et des vignerons. Sur les tables, des Côtes de Beaune ou de Nuits dont, ado, il côtoie la convivialité, observe l’alchimie. Il finit même par planter cinq ares de vignes dans le verger familial, à côté des fruitiers auxquels il voue une véritable passion, tout en suivant, pourtant, des études d’infirmier. “C’est un beau métier, mais il faut être à 100% pour être bon, reconnaît-il, et c’est un métier d’intérieur. Quand j’étais enfant, j’avais des copains fils d’agriculteurs, j’aimais le travail des champs, la paille, et cette notion de liberté, qui m’a toujours appelé ». Profitant de la mutation de sa jeune (sage-)femme, Adeline, à Mâcon, il suit donc une formation de responsable d’exploitation agricole, option viticulture. En stage chez Marc Guillemot, le « sage du Mâconnais», il se frotte à la biodynamie et confirme son envie de travailler la terre, mais l’investissement, financier et personnel, qu’implique ce nouveau départ lui paraît insurmontable. Hervé n’est pas prêt.

EN MARCHAMPT VERS TOI, PRIMEUR

En guise de catalyseur, ou de révélation, un éloignement radical : les 2 ans de service national qu’il effectue en coopération dans un dispensaire du Salvador, entre climat tropical et insécurité. Adeline et Hervé en reviennent avec une petite fille, la 1re de quatre enfants, et la certitude qu’il faut se lancer. Comme si les étoiles s’étaient alors alignées, trois semaines à peine après leur retour en France, on lui propose de reprendre 4 hectares de vignes en appellation Beaujolais-Villages, à Marchampt. Il y a aussi quelques hectares de bois et des prés, de quoi planter des fruitiers… La petite famille tombe immédiatement sous le charme de ce paysage vallonné, de ces parcelles escarpées depuis lesquelles on domine le cœur du village, l’école, l’église. “On a tout mis dans la balance, mon épouse a fait bouillir la marmite pendant les premières années, car c’était vraiment un projet de couple, pour lequel on s’est tout de suite compris”.  Peu de temps après, ils ont également la possibilité de racheter la maison attenante au domaine.
Elle comprend un cuvage -nom donné dans le Beaujolais au bâtiment abritant les cuves de stockage et de vinification- inutilisé depuis plusieurs années par le précédent propriétaire, mais en parfait état de fonctionnement. La boucle est bouclée. En 2007, Hervé fait ses premières vendanges. Avec l’aide de vignerons voisins venus lui prêter la main, car dans les vignes de Marchampt, le mot solidarité n’est pas vain (mais vin !).

CONVERSION ET CANASSON

“Pour ce premier millésime, on a fait un énorme travail de tri, il y avait 30 ou 40 personnes dans les vignes et à table, et on ne prenait que les beaux raisins. Je me rappelle de l’œnologue et de ses yeux ronds comme des billes ! Il m’a dit : «vous pouvez en faire ce que vous voulez…». Alors j’ai chaptalisé (en langage non-initié: ajouté du sucre à la fermentation), j’ai filtré, j’ai suivi une voie classique, pour mener à bien cette première vinification. Mais après, je me suis laissé aller à mes envies de nature. Dès le deuxième millésime, j’ai laissé deux tiers des raisins en fermentation naturelle.” Progressivement, il lance aussi la conver- sion du site en bio, dont il décroche la certification en 2012. Aujourd’hui, il est un peu moins exigeant sur le tri, mais n’utilise plus d’intrant, ni de levier de température ou d’action mécanique, une seule de ses cuvées est foulée aux pieds, et toutes partent en fermentation spontanée.
Quant à ses parcelles pentues, sur lesquelles aucun tracteur ne peut s’aventurer, Hervé les parcourt en compagnie d’un magnifique Comtois, cheval placide et robuste, “véritable pierre angulaire du domaine”. Ses passages entre les plans de vigne dessinent dans la transversale des sillons, comme autant de marches ou d’étages, qui protègent les terres du ruissellement et de l’érosion.

LA VIGNE EN ROSE

Dans cette nouvelle vie, la famille Ravera a vite pris ses marques. Les enfants descendent à l’école à pied, entre des lignes de vignes qui ne sont plus traitées, et Adeline continue à travailler à la maternité, même si Hervé tire maintenant de son exploitation “un salaire honorable”. “Je me sens à ma place dans mon travail, ça n’a rien de contraignant, je saute du lit pour aller au boulot. La vigne rend enthousiaste !” A 46 ans, dont 13 d’exploitation, il n’a donc rien perdu de sa foi. Elle a grandi comme le Grain de Sénevé, d’après lequel il a nommé son domaine. Dans la parabole biblique, quand cette toute petite semence de moutarde des champs pousse, elle est plus grande que les légumes et devient un arbre. Entre les rangs de Gamay, c’est la sérénité et la confiance du vigneron dans son propre travail qui ont prospéré. A grands coups de mises à l’épreuve quand même, comme en 2010, quand une attaque tardive de mildiou l’a surpris à son retour de vacances : “j’avais mis le moins de cuivre possible, ça n’a pas suffi… J’ai eu un tout petit rendement, pour un vin clairet, avec des notes amères, alors j’ai lâché prise sur la vinif, j’ai laissé les choses se faire. Mais contre toute attente, ça a donné quelque chose de très intéressant, l’importateur l’a trouvé super ! Et pour moi, ça a été une véritable prise de conscience, un virage : il y avait une clientèle pour les vins que j’avais envie de faire.”

Une clientèle étrangère notamment, aux Etats-Unis, en Australie, au Québec ou au Danemark, avec laquelle ses vins le relient, comme autant de traits d’union entre son vallon isolé et le reste du monde. Des vins qui lui valent également la reconnaissance de ses pairs, les Dutraive, Bertrand ou Lapalu qui hochent la tête avec approbation quand on cite son nom. Des vins dont il est fier : “le résultat me comble, ils sont digestes, viennent du cœur et de l’esprit. On me dit qu’ils sont élégants, je ne le sens pas vraiment, mais ce que je sais, c’est qu’ils ont une forme d’honnêteté, et en ça, ils me ressemblent : rien n’est fait pour les embellir, ni au propre, ni au figuré”.

+d’infos : Le Grain de Sénevé – Marchampt, 69

Le Mot de Thomas Lorival

Quand on m’annonce des vins dans lesquels il n’y a pas de soufre, mon défaut professionnel c’est d’imaginer soit de belles surprises soit des déviances et là, je les ai trouvés géniaux, plein de charme, avec une pureté, une énergie, beaucoup de précision. Ils sont souvent très gourmands, explosifs aromatiquement, un peu épicés. Et Hervé Ravera travaille sur une vendange entière, fait un gros travail éthique à la vigne, avec son cheval. Pour moi, il a tout juste dans sa démarche et ça donne des choses qui ont du fond, une âme. C’est souvent ça que je mets en avant quand je goûte un vin.

photos : Floartphotography

Mélanie Marullaz

Mélanie Marullaz

Journaliste SURNOM: Poulette. PERSONNAGE DE FICTION: Elastigirl. OBJET FETICHE: mon oreiller. ADAGE: à chaque Barba-problème, il y a une Barba-solution. (philosophie Barbapapienne) JE GARDE: mes épaules. JE JETTE: mes grosses cuisses de skieuse. DANS 20 ANS? la tête de mon père sur le corps de ma mère. presse@activmag.fr

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