rat des parquets
Quitte à raviver feu le sport, autant souffler sur les braises de vieilles réminiscences encore incandescentes. Il faut dire que j’avais une certaine allure en tutu… il y a 30 ans ! Si je ne rentre assurément plus dedans, reste à vérifier s’il me reste un minimum de grâce… tant pis, je tente.
Vous qui vous êtes toujours rêvée le chignon tendu dans un filet araignée (rien à voir avec les tutos spécial Halloween), la gambette galbée (hum… saucissonnée ?) dans un collant opaque couleur chamallow, enfilant votre plus beau jupon tout tulle dehors et laçant élégamment (tendance ficelle de rôti) vos chaussons cambrés… N’hésitez plus, la danse classique n’est pas réservée à une élite d’élues choisies avant l’âge butoir (DLC) de 12 ans.
J’ai donc ressorti mon lycra (et laissé volontairement de côté le justaucorps à paillettes de mes 15 ans, vestige de ma période flash danc’euse, paix à son âme !). Je l’ai enfilé à grand renfort de tiraillements suants et j’ai rejoint, le teint rougeâtre et la jambe au garrot, le parquet glissant, espérant retrouver les sensations de fierté torturée de mon passé de rat désarticulé.
Toute de noir vêtue, Black Swan n’a qu’à bien se tenir, me voici face au miroir…
ENTRECHAT ET PETITE SOURIS
Premières positions à la barre. Pas question de s’y cramponner nerveusement, même si la tentation est grande. Règle d’or de la danse classique : la légèreté. Les pas sont feutrés, les sauts amortis et les mouvements graciles. Fastoche ! Grand plié, soubresaut, jeté sur le côté… Et le pas de bourrée, me direz-vous ? Rien à voir avec celui que l’on pratique titubant en fin de soirée, celui-là, je le maîtrise sur le bout des pieds !
C’est vrai, a priori rien de sorcier, si ce n’est que tout mouvement s’accompagne d’un protocole de rigueur : jambes archi tendues, pointes effilées, épaules relâchées, nombril absorbé, dos droit, port altier et bien entendu aucun débordement fessier vers l’arrière ne sera toléré. Vous pouvez répéter ?
Et on sourit (lèvres chevrotantes tirant vers le grimacement étant de fait proscrit) et on lève la tête (toute tentative qui viserait à regarder ses pieds pour éviter l’emmêlement étant là aussi exclue de la marche à suivre). Malgré les regards jetés dans la glace qui me renvoient les détails d’une posture peu académique, Judith parvient à décomposer chaque mouvement pour le rendre «quasi» fluide, on s’y croirait presque.
LE RAT-DEAU DE L’OPÉRA
Vient la phase largement redoutée des assouplissements à terre et avec elle les souvenirs presque suppliciés de la petite grenouille que je fus à qui l’on appuyait sur les fesses pour assouplir les adducteurs. Je chasse cette pensée, les spasmes et autres petits cris douloureux de mes copines de parquet aussi, pour aller au bout de ces étirements pour le moins profonds. Profits dont je récolte aujourd’hui encore les «bénéfices». Ne me cherchez pas, je suis d’humeur positive ! Et les tiraillements de mes ischio-jambiers n’y pourront rien changer.
Allez, juste pour la route… Première, quatrième, cinquième, les pointes tendues, la tête haute… et on relâche… Enfin dès que la crampe qui me déchire le mollet sera partie, promis je relââââche. On dirait un ballon de baudruche qui se dégonfle.
Finalité, j’ai quelques notes de piano qui me trottent dans la tête et l’impression d’avoir réalisé un rêve de petite fille. Demain je passe commande : Pink Swan 2, le retour.
© Lightfield Studios