à pieds d’œuvres
ELLES SONT TRANSPARENTES MAIS NE PASSENT PAS INAPERÇUES. C’EST TOUT L’ART D’ATELIER ST EUSTACHE ET DE SA CRÉATRICE VIOLETTE PROST, ARCHITECTE MÉTAMORPHOSÉE EN EXPERTE ES SOCQUETTES PAR LA GRÂCE DU JAPON.
Violette crée des chaussettes. Mais ce n’est pas pour la rime, facile, que cette architecte de formation a choisi d’habiller les pieds de ces dames. La cause est beaucoup plus géographique. Elle se trouve du côté du Japon, où la Lyonnaise réalise son voyage d’études, en 2013. Le pays du Soleil Levant voue un culte à l’accessoire chargé de couvrir les orteils. Là-bas, les chaussettes s’affichent avec bonne humeur : à fleurs, diaphanes, nimbées de motifs plus ou moins discrets. Toutes générations et tous milieux sociaux confondus. «Ça a toujours été comme ça, c’est normal : les chaussettes, ici, on les montre !». Partie intégrante de l’habit traditionnel, la socquette tient son rang. Et dans un pays qui a la culture de l’uniforme, l’art de la différenciation et du petit détail vaut de l’or.
CHAUSSETTE-VEDETTE
«Les Japonais ont un tel sens du beau… Tout cela m’a fascinée», raconte la jeune femme qui devient accro aux chaussettes nippones, et en garnit abondamment sa valise de retour. A Lyon, dans la rue, on l’arrête même pour lui demander où diable elle a déniché de si chouettes trouvailles. «Si, en France, on se parle entre inconnus, c’est qu’il y a un truc !», s’exclame celle qui est à l’aube de délaisser la carrière d’archi qui l’attend. Pour l’instant, dans l’Hexagone, la chaussette est encore un objet caché, utilitaire, socle à la chaussure.
T’AS DE BELLES CHAUSSETTES, TU SAIS…
Violette Prost imagine Sa chaussette transparente, sans imprimé, mais parcourue de lignes géométriques car elle a ce côté «graphique et délicat, cette élégance que les autres n’ont pas». Un pur croisement entre chaussette et collant. En 2016, Atelier St-Eustache, sa marque, dévoile la première collection : six modèles, aux coloris déclinables. Ces chaussettes sur lesquelles on se retourne incitent à montrer ses chevilles et à s’amuser à organiser des rappels de couleurs avec sa tenue. Au niveau style, la créatrice plaide pour l’intemporel.
CARNETS DE VOYAGE TISSÉS
A regarder leur tissage, ça a presque l’air simple. Sauf que non. Il a fallu trouver le bon fabricant. Une entreprise familiale italienne finalement alors qu’Atelier St Eustache aurait préféré le régional. Mais avec son fil plus fin, moins élastique, la chaussette transparente est d’une confection casse-pieds : «Elle ne pardonne rien. On voit tout ce qui se passe à l’envers. Il faut être précis». C’est confortable ?», hasarde-t-on. «Il n’y a pas de sensation de flottement désagréable. L’aspect ressemble à un collant, en plus épais. La sensation sur le pied est plus légère qu’une chaussette». Pointe et talon sont renforcés, en coton, le reste est constitué de fils de polyamide.
Si la première collection était une évocation de Tokyo, celle de la rentrée 2019 rend hommage à Londres, où la grande blonde a vécu 2 ans. «On reste dans les villes, l’architecture», sourit-elle, tout en songeant à une future ligne inspirée de la nature, corse. «Je suis assez classique. Je m’habille simplement. La chaussette transparente, c’est mon petit coup de folie.»